On le dit assez souvent depuis l’élection de Barak Obama : désormais, les élections passent par le web. Qu’il s’agisse d’un site ou d’un blog officiel, de relations avec des leaders d’opinion ou de messages viraux, tout est bon pour se faire entendre et drainer du trafic parce que “le trafic, c’est un peu comme autant de votes potentiels dans les urnes”. Soit. Mais le problème, c’est qu’à force de vouloir truster le web, les candidats rivalisent de bêtise en nous replongeant volontiers dans des débats de maternelle, donnant par la même occasion une piètre image de la sphère politique française.
A commencer par les lolcats d’Eva Joly. Les lolcats, c’est mignon, ça buzze, ça se partage dans tous les sens, Nikos nous le répète assez souvent chez les Guignols. De là à détourner des lolcats pour diffuser son message, il n’y a qu’un pas. Un grand pas pour certains qui ne s’y prêtent pas. Un tout petit pas pour l’équipe d’Eva Joly qui n’a pas hésité à le franchir. Au final, des vidéos qui peuvent faire sourire mais appuient là où ça fait mal : la campagne 2012 vole bien bas.
Certains argüeront qu’il s’agit là d’une manœuvre maladroite d’un parti qui n’a pas les moyens de ses ambitions et tente de passer par la fenêtre quand il se prend la porte en pleine tête. Mais que dire, alors, des deux candidats en tête des sondages : Nicolas Sarkozy (certes, pas encore tout-à-fait candidat à l’heure actuelle) et François Hollande ?
Côté UMP, on n’a pas hésité à lancer Le changement c’est maintenant, une page sur laquelle on peut découvrir le “vrai discours du Bourget” de François…euh Hollande, revisité à la sauce UMP. Vous trouviez que les lolcats volaient bas ? Cette lettre va vous plaire. Une tonalité très “c’est toi qui l’as dit, c’est toi qui l’es”, une interprétation à peine orientée pour une fustigation en bonne et due forme.
Mais ce n’est rien à côté d’une parodie de Secret Story réalisée par quelques jeunes de l’UMP. Les candidats PS y sont présentés comme de simples participants à un jeu de télé-réalité dont on connaît le niveau intellectuel. Qui a dit “ras des pâquerettes” ?
De l’autre côté, ce n’est malheureusement pas tellement plus glorieux. Les attaques mesquines ne sont pas réservées à la droite et le PS s’est également lancé dans la parodie avec un clip qui ne fait pas dans la dentelle et tacle la droite là où ça fait mal.
Bref, la campagne présidentielle a donné le ton : exit le sérieux, on joue la carte du décalage. Sauf à dire que le décalage ne s’improvise pas et que visiblement les responsables de la communication des partis n’ont pas encore bien intégré les codes du web. S’il est évident que la campagne doit passer par le numérique, on ne peut pas pour autant faire n’importe quoi sous prétexte que c’est du web. Prenons les médias classiques : quel candidat aurait osé faire un show aussi bas de gamme au 20 heures d’une grande chaîne nationale ?
Visiblement, les chargés de campagne ont omis un petit détail qui a son importance : le web n’est pas un ramassis d’ados attardés sans aucune conscience citoyenne. Les électeurs qui s’informent sur le web sont aussi sérieux que ceux qui lisent le journal ou suivent les infos télévisées. Alors s’adapter à un nouveau média, oui ; entrer dans un combat de coqs, non. Mesdames, Messieurs, reprenez-vous : le web n’est pas la succursale d’une cour d’école !